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- Point Commun - juin 2015 - n°95
Entretien avec
Sophie de Paillette
Consultante associée du
cabinet conseil CoManaging,
Sophie de Paillette a réalisé le
portrait identitaire du territoire
rochelais. Elle nous en livre les
traits caractéristiques et les
singularités.
Quels sont les éléments qui font la particularité
et la force de ce territoire ?
« Ce territoire a une identité vraiment très singulière
et complexe, comparé aux autres, et une personnalité
très forte. Son identité est pétrie de paradoxes et de
contradictions : La Rochelle génère une fierté géante
mais les gens ne savent pas dire sur quoi elle porte.
Il y a un ancrage affectif très fort - les trois-quarts
des habitants ne veulent pas en partir ! - mais c’est
un territoire ouvert, il y a un esprit d’indépendance
mais une fidélité à la nation. C’est une ville maritime
par excellence mais avec une approche de la mer très
particulière. Cela crée un décalage entre l’image que
les gens en ont et la richesse réelle du territoire qui,
elle, est très largement méconnue ».
Pouvez-vous nous en dire plus sur ses atouts ?
« La Rochelle est une pionnière dans de nombreux
domaines, un laboratoire d’expérimentations :
première ville à s’intéresser aux bains de mer, elle
a aussi construit les premiers logements à loyers
modérés, a été l’un des premiers territoires à
s’organiser en intercommunalité… et je ne parle
pas de ses initiatives en matière de développement
durable. C’est une cité audacieuse qui parie volontiers
sur l’avenir. Son identité est aussi fortement marquée
par des valeurs d’indépendance et d’attachement à
sa différence, notamment à sa liberté de penser. Elle
possède une importante capacité de rebond et de
réinvention. C’est une ville ouverte sur le monde, qui
rayonne, et qui fait «
aimer la vie
». Elle propose un
équilibre idéal entre hédonisme et humanisme. Au
final, on peut dire que ce territoire est un concentré de
spécificités, un précurseur et une référence… qui ne
demande qu’à se réveiller aujourd’hui ».
La démarche de « marketing territorial »
tombe donc à point nommé ?
« Oui, car elle va servir à mettre en mouvement
le territoire en donnant la capacité aux acteurs de
se rencontrer, d’échanger et d’agir collectivement.
Chose d’autant plus importante pour La Rochelle
qui fonctionne énormément en réseaux, mais où ces
réseaux ne se connaissent pas et ne travaillent pas
ensemble ».
Concrètement, comment avez-vous fait
pour parvenir à ce portrait identitaire ?
« Nous avons été sur le terrain, organisé des groupes
de discussion, conduit des entretiens et réalisé des
enquêtes sur la perception qu’ont les habitants, les
entreprises, les visiteurs du territoire. Grâce à toutes
les informations collectées*, nous avons pu ensuite
définir ce portrait identitaire qui montre les atouts
à valoriser, mais aussi les points négatifs à traiter.
Dans ce travail, on souligne les éléments les plus
spécifiques qui permettent au territoire de « parler de
lui-même ». L’important est de pouvoir faire émerger
une voix propre, différente de celles des autres
territoires, et qui ne soit pas de la langue de bois ».
* Près de 3 700 questionnaires ont notamment
été remplis
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« Un concentré
de spécificités,
un précurseur et
une référence »
véritables richesses et les potentiels du ter-
ritoire, ainsi que les valeurs partagées entre
les acteurs qui vont favoriser la cohésion et
l’action commune. L’identité s’apparente
à l’ADN du territoire. C’est une combi-
naison de caractéristiques, de traits qui le
rendent singulier, comme c’est le cas pour
une personne. A partir de ce portrait, et du
diagnostic portant sur l’attractivité, on peut
ensuite définir un positionnement, une stra-
tégie d’actions et une marque de territoire
partagée.
l
* Démarche initiée dans le cadre du projet européen
AT-brand qui apporte des aides financières et permet
des échanges de pratiques entre villes européennes.
>>>
Des exemples de marques
créées par d’autres territoires
© E. de Paillette